Des revues pseudo-scientifiques
De la même manière que des sociétés ont établi des rentes de situation basées sur l'exploitation du modèle lecteur-payeur (abonnement), des revues Open Access parasites ou « prédatrices » exploitent à leur profit le modèle « auteur-payeur » précédemment décrit.
Les auteurs, généralement sollicités par mail, sont invités à soumettre des articles, lesquels sont systématiquement acceptés moyennant des frais de publication ou APC, quelle que soit la valeur scientifique des travaux soumis.
Les « comités éditoriaux » de ces revues sont généralement composés de membres fictifs et/ou de chercheurs victimes de l'escroquerie ou bien inscrits sans leur consentement.
Compass to Publish
L'université de Liège propose un outil en ligne pour évaluer le degré d'authenticité d'une revue : Compass to Publish
La méthodologie est basée sur une liste d'une vingtaine de critères (listes de confiance, blacklistes, contrefaçons, référencement, etc.)
Repérer les prédateurs
Cependant, il n'est pas toujours aisé de savoir si un éditeur ou une revue est un "prédateur".
Quelques indices possibles :
- Invitation à publier envoyée par mail au chercheur (spam).
- Adresse mail de contact non professionnelle (de type gmail par exemple).
- Les manuscrits doivent être soumis par email.
- Revue qui promet une publication extrêmement rapide.
- Pas de transparence sur le peer-reviewing.
- Pas de transparence sur les frais de publication (APC).
- Frais de publication modestes (ex : inférieurs à 150$).
- Frais d'accès ou embargo sur la diffusion.
- Orthographe et grammaire incorrectes (site ou message).
- Facteurs d'impacts erronés (consultez les Journal of Citation Reports)
- Le site de la revue met en avant un Index Copernicus.
- Absence de politique de rétractation.
- etc.
Des indices à priori rassurants :
- La revue est référencée dans le DOAJ.
- La revue est membre de l'Open Access Scholarly Publishers Association (OASPA).
- La revue suit explicitement les recommandations de l'International Committee of Medical Journal Editors (ICMJE).
- La revue est membre du Committee on Publication Ethics (COPE) - mais pas suffisant car certains de ses membres sont issus de revues prédatrices.
Consultez également le site QOAM, site indépendant qui évalue la qualité d'une revue (mais non exhaustif).
La "zone grise" des éditeurs "de qualité faible ou douteuse"
Comme le souligne Hervé Maisonneuve dans un billet de blog (2023), la situation a évolué : les auteurs ont pris conscience du phénomène, sont mieux informés, et de leur côté les éditeurs dits prédateurs ont revu leur stratégie, "en naviguant dans la zone grise d’une qualité faible ou douteuse" qui les rend peut-être moins facilement identifiables. C'est d'ailleurs ce que souligne un rapport de l’InterAcademy Partnership (2022).
Les éditeurs à frais de publication (APC) peu élevés et/ou dont le peer-reviewing est moins rigoureux que chez les grands éditeurs ne sont pas nécessairement tous "prédateurs" (on peut d'ailleurs s'interroger sur le caractère "prédateur" des mastodontes de l'édition scientifique - Elsevier, Wiley, SpringerNature, etc. - qui exercent une situation de monopole et imposent des tarifs d'abonnement ou APC très élevés).
De même, à côté d'articles sans valeur scientifique, on trouve aussi dans certaines revues prédatrices des contributions de chercheurs de faible notoriété qui y publient, parfois de bonne foi, sous la pression du publish or perish.
Articles et rapports
- Lutter contre les revues et les conférences scientifiques prédatrices (résumé). Rapport de l'InterAcademy Partnership (2022)
- Kyle Siler et al. "Predatory publishers’ latest scam: bootlegged and rebranded papers", Nature 598, 563-565 (2021) doi: 10.1038/d41586-021-02906-8
- Grudniewicz, Agnes, et al. "Predatory journals: no definition, no defence." (2019): 210-212. doi: 10.1038/d41586-019-03759-y
- Un autre regard sur les revues prédatrices – entretien avec Éric Filiol (2018). Pour la Science.
- Shamseer, Larissa, et al. "Potential predatory and legitimate biomedical journals: can you tell the difference? A cross-sectional comparison." BMC medicine 15.1 (2017): 28. doi: 10.1186/s12916-017-0785-9 [table 10]
- Alex Gillis "Des universitaires se font avoir par des revues frauduleuses", 12 janvier 2017.
- Berger, Monica, and Jill Cirasella. “Beyond Beall’s List: Better Understanding Predatory Publishers.” College & Research Libraries News 76.3 (2015): 132-5 (republication).